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05-01-2008

Perio - Interview par Cathimini

Perio

"Interview par Cathimini"

Cathimini du fanzine Abus Dangereux nous propose la version complète de son interview avec ?ric Delporte, maintenant seul maître à bord de Perio.

- Sept ans de réflexion -
Bien que la plupart des chansons de "The great divide" aient été écrites aux Etats-Unis, ce troisième album de Perio sonne résolument européen, mettant joliment fin à sept ans de silence.
Perio, c'est le projet de Eric Deleporte, graphiste de métier et globe trotter convaincu, qui a commencé à faire de la musique dans les années 80 dans Picasso y los simios, groupe mythique nantais souvent cité en référence par Philippe Katerine, Little Rabbits ou Dominique A. Sa rencontre avec Sarah Froning dans les années 90 l'amena à créer Perio et à traverser l'Atlantique, tout en entamant une belle collaboration avec le label Lithium... qui n'eut le temps de se décliner qu'en deux albums sortis en 94 et 99. Lithium disparu, Eric et Sarah installés aux Etats-Unis, bye bye Perio, ses mélodies psychédéliques et son grain de folie nonchalant... Jusqu'à ce concert à l'automne 2006 en formation basse/guitare acoustique où Eric entrouvrait à nouveau la boîte à chansons et laissait filer quelques jolies nouveautés.
Aujourd'hui "The Great Divide" apporte une réponse rayonnante et convaincante aux doutes que l'on pouvait émettre sur la viabilité de Perio grâce à un concentré d'influences pop (la finesse mélodique des Go Betweens, le son de guitare des Pale Fountains, l'honnêteté de I am Kloot) exprimées avec un feeling américain (grosse basse bien ronde, batterie sèche, banjo, lapsteel). Un petit apéro s'imposait donc en attendant de retrouver Perio sur scène en trio, avec Eric Deleporte à la guitare acoustique, Olivier Taraud à la basse et Stéphane Milochevitch à la batterie.
Plus de 7 ans entre 2 albums, as-tu douté à un moment de ne jamais sortir "The Great Divide" ?
Il aurait du sortir à l'origine sur Lithium en 2001/2002. Comme le label s'est arrêté, ça a pris plus de temps que prévu. Au départ quand j'étais à Chicago, j'ai rencontré pas mal de musiciens et de labels intéressants comme Drag City, Thrill Jockey. Par l'intermédiaires d'amis, j'ai rencontré Darren Richard qui fait partie d'un groupe pas connu (Pinetop Seven sur le label Truckstop) qui avait son petit studio dans son grenier en plein centre de Chicago. Je lui avais donné des démos et il a beaucoup aimé donc nous avons décidé d'enregistrer ensemble "Where echoes bounce". La plupart des chansons ont été composées à NY et Chicago. Mais le reste a été enregistré à droite à gauche avec mes amis quand je suis revenu à Paris. Le squelette a été fait avec Pierre Bondu, puis j'ai travaillé avec Christian Quermalet qui a refait quelques batteries. Comme il venait d'avoir son diplôme d'ingé son de l'INA, il a repris les fichiers pour mixer et finaliser le projet.
Les morceaux ont été écrits il y a 3 ou 4 ans, mais les as-tu retravaillés par la suite ? Quelle est l'influence du lieu ?
Peu importe que je sois à Chicago ou à Paris, l'important est que je m'entende bien avec les gens avec qui j'enregistre. Les structures des chansons sont relativement simples qui laissent une part assez large à l'interprétation. On a commencé à répéter pour les concerts, et c'est encore différent. C'est tant mieux car si je devais faire à chaque fois la même chose, je m'ennuierais.
Un morceau aussi direct que "Leap Frog" bénéficie de pleins d'arrangements différents, un changement d'orchestration qui rend le morceau très riche. Parfois ce n'est même pas audible comme le petit orgue au fin fond de "Jiggling". Est-ce déjà dans ta tête quand tu écris ou est ce que tu construis avec les copains, tu cherches, ils te donnent des idées...
Il y a toujours un squelette acoustique sur lequel j'aligne des arrangements électriques par la suite, au moins deux ou trois couches de guitare électrique. Ca donne la base pour que viennent se greffer des percus, des basses et de la batterie. Les pianos, c'est l'idée de Pierre qui a vraiment été derrière ce projet. Il m'a demandé de l'accompagner sur scène, et entre deux tournées, comme nous étions voisins, il m'a aidé à mettre le disque en place. Je me suis concentré sur les voix, les guitares et le banjo.
Justement tu en joues sur "Where echoes bounce" qui commence très acoustique et évolue vers une ambiance beaucoup plus électronique, avec des samples, des nappes. Est-ce important pour toi de ne pas te laisser enfermer dans un son, un style ?
Il faut noter sur ce morceau la participation de Mick Turner des Dirty 3 qui était mon voisin à Chicago. J'ai vu son projet solo dans le club du coin The Empty Bottle, et il m'a proposé de jouer avec moi. Il ne travaille que sur des instrumentaux, mais je me suis dit que c'était une bonne idée de travailler la base des chansons de Perio avec lui, avant de mettre les voix. Jim White est passé et nous avons enregistré des batteries ensemble. Mais du coup la structure rythmique sonnait vraiment trop Dirty 3 et cette collaboration ressemblait de moins à moins à Perio. Nous avons donc fait deux enregistrements mais je ne pouvais pas les placer sur mon album, car la signature est trop particulière. Les chansons de Perio ont un format très pop, elles sont très courtes. Donc pour revenir à "Where echoes bounce", nous avons passé la batterie à travers une pédale d'effet sans-amp et ça a donné ce côté très rêche, très années 80. C'était le but de faire évoluer la chanson d'un univers très doux avec roulements de balais, banjo et au fur et à mesure les instruments viennent se greffer et ça finit en instrumental.
Tes collaborations au cours des dernières années ont-elles influencé ta musique ? (Yvan Hiot, Pierre Bondu, Oslo Telescopic...)
Oui complètement. Je trouve très enrichissant de faire toutes ces collaborations. C'est parce que j'ai la chance d'avoir des amis autour de moi comme Christian des Married Monk. On se connaît depuis très longtemps, on se respecte énormément, on travaille ensemble depuis le premier Perio. Donc c'est album est la synthèse des deux premiers, je pense que ça boucle une trilogie. D'ailleurs les deux premiers vont être réédités à l'occasion de la sortie de "The Great Divide". Le premier album me rappelle certains disques de Sebadoh, avec beaucoup de duos, enregistré avec les moyens du bord à Bordeaux. Mais je tiens à dire qu'il n'y a pas eu de copiage car ce sont des amis qui nous ont fait découvrir les premiers albums de Sebadoh, une fois que nous nous sommes retrouvés avec Sarah à New York. Ca nous a fait bizarre, car en plus le timbre de voix de Lou Barlow est similaire au mien sur certaines chansons.
Justement tu joues beaucoup de ta voix, tu la fais monter, descendre, tu miaules presque sur "Jiggling", tu hulules ("Lo-res NYC", "Unconnected soul"), tu siffles sur "BFAP"...
En fait, c'est Christian qui siffle et fait pas mal de ouh ouh (rires) Le sifflement se prêtait bien à "Brother From Another Planet", car il s'agit d'une rencontre mec/nana plutôt comique. BFAP a été inspirée d'une bonne copine de NY qui nous racontait toutes ses histoires de mecs. Une fois, elle nous a invités pour avoir notre avis sur l'un de ces mecs et on s'est vraiment retrouvés dans un film de Woody Allen. Il y avait un côté magique ! La chanson prend sa parole à elle et pense au type qu'elle avait en face d'elle. Pour en revenir à ta question, j'aime expérimenter aussi bien au niveau des arrangements que de la voix. J'aime bien la pousser au maximum dans les aiguës ou les graves. Ca peut être lié au texte ou simplement parce que j'ai envie de faire passer une émotion. Je ne veux pas que ça devienne un mécanisme. Mais peut être que live si ça ne s'y prête pas, je chanterai différemment.
"The March" est un peu à part, à cause du piano mais aussi du discours qui semble une critique des gens qui voudraient que le monde soit plus juste, mais ont la flemme ou la peur de passer à l'action.
Bien sur on se retrouve tous un peu dedans mais c'est une chanson inspirée d'un épisode qui s'est passé à Chicago. Je me suis retrouvé un jour au centre ville envahi par des ménagères qui faisaient grève. Aux Etats-Unis, personne ne fait plus grève depuis longtemps. Par exemple à NY tu es parqué, y a les flics autour et ça forme un petit cercle. Mais on ne va pas arrêter la circulation pour autant. Alors qu'à Chicago, il y a encore des syndicats assez forts dans les industries qui permettent de s'exprimer un peu. Quand je parlai avec des amis dans l'underground, je sentais qu'ils avaient envie de manifester leur mécontentement, mais le faisaient très rarement. La chanson parle de ça, tout reste superficiel : on y pense, mais on ne passe pas à l'action.
"Unconnected soul" commence par une phrase forte : "the creep is back in Jerusalem". Finalement derrière des allures assez pop, Perio aurait il un discours politique ?
C'est inspiré par des amis de Chicago dont la femme est de Jerusalem. Ils venaient d'avoir un bébé et faisaient des va et vient entre les deux continents et je trouvais ça complètement dingue quand je voyais aux infos tout ce qui se passait à Jerusalem. Suite à toutes les discussions que j'ai pu avoir avec eux sur les rapports israélo-arabes, les attentats... j'ai créé cette fiction sur un terroriste qui s'exile aux Etats-Unis, puis retourne vivre à Jerusalem mais qui ne prend pas parti tout de suite. Jusqu'au jour où il décide de faire une action qui lui est fatale.
Est-ce que le choix de rentrer en France a été dicté par la situation politique des USA ?
Pas du tout. C'est parce que le sujet de thèse de Sarah concernait des musées parisiens. Mais depuis que je suis revenu en France, je dois avouer que je n'arrive pas trop à me positionner. Il y a ce problème d'identité culturelle : je suis nantais à la base, j'ai vécu 8 ans aux Etats-Unis, 5 ans à Paris... Sarah a commencé son doctorat qui lui a pris de plus en plus de temps. Donc j'ai repris les rennes du groupe car je ne voulais pas laisser complètement tomber la musique. Nous avions composé et chanté ensemble certaines chansons lors de notre tournée sur la côte Est en 2000. Nous voulions vraiment qu'elle soit présente sur l'album, mais elle n'a pas trouvé le temps de faire plus que quelques choeurs.
Perio est un groupe très fluctuant donc. Aujourd'hui à part toi, qui est-ce ?
Il y a Olivier Taraud à la basse que je connais depuis près de 20 ans et qui a joué avec moi déjà dans Picasso y los simios. Il y a Stéphane Milochevitch à la batterie qui a un projet très intéressant qui s'appelle Thousand et Bramier. Son jeu de batterie m'a paru assez classieux, donc on a discuté et on s'est rendu compte qu'on étaient voisins. Nous avons joué live de manière totalement improvisée quelques temps plus tard dans un festival à Nantes pour Jet FM. Ca s'est super bien passé et cette magie m'a poussé à lui proposer de faire partie du groupe pour les concerts. D'autant plus qu'il joue aussi de la guitare...
Les deux chansons ouvertement inspirées par NY sont assez mélancoliques. Est ce que le fait de quitter NY t'a rendu nostalgique de cette ville ?
Non, ça vient directement de l'impression que tu as quand tu vis là-bas. Après 5 ans à NY, tu commences à choper les gens, faire de vraies rencontres. Mais tu les vois une fois, puis tu ne les revois plus pendant 2/ 3 mois et tu t'aperçois que dans cette espèce de mégalopole, tu te sens complètement seul. Dans "Medium crash" on avait essayé de retranscrire musicalement ce sentiment avec le son d'un aquarium et des bruits de voiture. Pour "Lo-res NY" il s'agit d'un parcours géographique à travers la ville que je me suis fait de manière complètement fantasmagorique. Ca évoque pas mal l'énergie de la ville, les fêtes sur la 14ème, avec ce brouhaha énorme, constant dans la ville qui t'amène à faire le silence dans ta tête quand tu as une overdose de sons.
"Jiggling" est l'état dans le quel tu te mets quand tu ne trouves pas l'inspiration ?
Ouais, c'est un peu ça. Je suis assez nerveux de nature et je suis peut être ce type qui n'arrive pas à trouver sa place, qui a besoin d'une activité, d'une découverte, d'un voyage... Et la chanson est écrite du point de vue d'un personne age fictif qui essaie de le contrôler, de le calmer.
Et "Leap Frog" atteint des sommets de farfelu avec un monstre, des slips, ...
C'est un morceau qui date de 93 et qui n'est pas fini. On le jouait dans les fêtes entre amis avec Sarah, juste pour le fun. Il y en a toujours un sur nos albums et Pierre le voulait absolument pour cet album.
Justement sur"Medium Crash" il y a un mec qui sort une sorte de charabia sur "Lopsided"...
C'est un extrait de l'Ursonate de Kurt Shwitter. C'est un graphiste allemand qui faisait partie du groupe Dada dont quelqu'un m'avait passé un enregistrement. C'est assez hallucinant car c'est très précis... Il a débarqué parce qu'il fallait une cassure dans le morceau dont le titre veut dire "Bancal" et qui parle de la décadence d'une certaine jeunesse américaine.
Tu avais sorti 15 exemplaires d'une démo de "The Great Divide" il y a 2 ans.
C'est la nana de French Touche qui voulait m'aider aussi à l'époque. C'est juste le squelette de ce que j'avais fait avec Pierre. Mais c'est inécoutable maintenant que l'album est là, avec l'ampleur que lui a donné le mastering de Mike Hagger. Il avait masterisé "Where echoes bounce" à l'époque de l'enregistrement à Chicago. Sept ans après, driiiing !
Comment as-tu fini par trouver Minimum ?
J'ai créé ma page Myspace l'an dernier et j'ai commencé à reprendre des contacts. J'ai rencontré un artiste qui s'appelle SingSing, on a sympathisé et il m'a présenté Mariette qui s'occupait de le faire tourner. Elle montait la structure Minimum en partenariat avec Raphaël à ce moment-là. Ils ont écouté les 3 albums et ont bien aimé.
- Cathimini

 
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